Avis

Adieu Eri a été une lecture coup de poings, aussi glaçante qu’une douche froide. Tatsuki Fujimoto ne nous ménage pas pour parler du deuil, de la mort, du suicide, des liens et ce que l’on laisse au monde lorsqu’on disparait. Cette dernière proposition est au cœur de l’intrigue. Une mère mourante va donner à son enfant un smartphone pour qu’il la filme et ainsi garder une trace de son existence. Ce qui est glauque, c’est qu’elle lui demande de filmer même ses derniers instants. Yûta devient mordu de cinéma et exécute les volontés de sa mère, sera-t-il capable pour autant d’immortaliser sa mort?

Dans une mise en scène particulière, le lecteur est transporter dans un manga où la vidéo et la réalité se confondent. C’est déroutant car même si le mankaka a mis en place des repères visuels, le trouble persiste. La rencontre de Yûta avec Eri va marquer un tournant dans sa vie. Aussi passionnée de cinéma que lui, elle va même faire son éducation dans le domaine et lui lance le défi de faire un meilleur film que celui qui lui a valu de mauvaises critiques à la fête du lycée. Ces deux personnages m’ont touchée et fait de la peine. J’ai ressenti leur profonde solitude et cette sensation de ne pas trouver sa place dans la société, d’être incompris.

Ce manga aborde également les événements traumatiques qui nous marquent à vie. Pour Yûta, la maladie de sa mère était déjà éprouvante mais cette demande de filmer ses derniers instants va l’affecter plus qu’il ne le pense. D’autant plus qu’on se demande si Eri est là pour l’aider à guérir ou le tourmenter encore plus.

Tatsuki Fujimoto nous offre donc une œuvre profonde et troublante. Une véritable critique de cette tendance de photographier et de filmer chaque instant de nos vies qui reflète, dans le manga, cette peur viscérale de disparaitre, de ne rien laisser comme trace dans ce monde. Car finalement, ces vidéos ne seraient-elles pas plutôt qu’une mise ne scène de nos vies, de que l’on a envie de montrer ? Est-ce la réalité ? Avec son cadrage particulier, son histoire sombre et ses personnages touchants Au revoir Eri est un titre plein d’émotions et d’angoisses. J’ai adoré.

Djihane.